lundi 6 août 2012

Analyse bernadologique de la mort de Javert

L'inspecteur Javert, alias Francis Dusserre, prolonge ses réflexions sur la géographie bernardienne et javertienne dans l’œuvre de Victor Hugo.Tous ces travaux seront bien sûr remis à la Préfecture.

"J.C Moreau a raison d’affirmer qu’il faut « s’appuyer sur des faits réels constatés par l’expérience ». La question du sort de Javert doit être traitée avec les outils et méthode de la science expérimentale et non pas en interrogeant les guéridons tourneurs.


Toute tentative d’expliquer un suicide est un viol du suicidé pour qui ce dernier acte – plus ou moins théâtral – est l’ultime liberté et l’ultime droit à exister.


Je vais malgré ma répugnance à réaliser ce viol tenter d’analyser bernardinement l’acte ultime de Javert en m’appuyant sur des faits indiscutables car géographiques. Quoi de plus réel et précis qu’un plan de ville ?


La marche vers la mort de Javert va du 7 rue de l’Homme Armé au pont Notre - Dame.


Prenons les choses par la fin, le « Plouf », il a lieu précisément au bout d’un quartier de vieilles ruelles qui trente ans plus tard sera rasé pour faire place au Théâtre Lyrique, qui est aujourd’hui le Théâtre de la Ville, mais qui fut, de 1880 à 1969 ( à l’exclusion d’un temps sombre où il prit le nom de Théâtre de la Cité) le Théâtre Sarah Bernhardt. La loge même de la grande Sarah se trouvait au point précis où l’on retrouva en 1855 un autre suicidé, Gérard de Nerval pendu à un réverbère.


Remontons le chemin Javertien. Partant du 7 rue de l’Homme Armé ( rue aujourd’hui incorporée à la rue des Archives, non loin de la maison parisienne de Jacques Cœur), Javert va traverser en zigzagant au fil de ruelles sordides tout un quartier de taudis et autres galetas. Lui qui a toujours obéi à des ordres pour éviter le désordre comprend-t-il que ce n’est pas sa police qui ramènera l’ordre dans ces quartiers ? La lèpre des rues sera vaincue par Rambuteau et Haussmann, le choléra qui ravage Paris en 1832 sera vaincu par la médecine pasteurienne et les famines par les ingénieurs du chemin de fer , rien ne sera amélioré de la vie humaine par lui Javert ni par les discours de Marius et autres pensifs-penseurs ou sociaux-socialistes.


Est-ce suffisant de découvrir que l’on ne tient pas le bon rôle pour quitter la scène pour la Seine jaune* comme on l’a qualifiée à l’époque (le Danube Bleu et la Seine jaune) ?


En définitif je ne chercherai pas à percer plus loin le mystère Javert lui laissant le droit au secret.

La pompe à eau du Pont Notre-Dame

J’enchaînerai par une légende urbaine qui commence justement près de l’endroit où se sont suicidés Javert et Nerval : le secteur aujourd’hui de la place du Châtelet. A deux pas du ventre de Paris, des Halles et du charnier des innocents, à côté de l’alchimique tour saint Jacques, à un pont de l’Hugolienne Notre Dame de Paris, non loin de la place de grève, place des supplices et sur l’emplacement de l’horrible Châtelet, prison, salle de tortures et morgue pour les ancêtres de la police scientifique. Un quartier hier terrible où aujourd’hui on achète des fleurs et où l’on va au spectacle.


L’histoire commence toujours ainsi : un chauffeur de taxi de nuit, jadis c’était un cocher de fiacre, est en station à la fin encore sombre de la nuit dans le secteur du Châtelet. Il commence à s’endormir à son volant, quelqu’un ouvre la porte arrière de son taxi, une femme emmitouflée dans un grand vêtement lui demande :


- « Conduisez moi à l’angle de la rue de la Roquette et du Boulevard Ménilmontant»


A cette heure le trajet est rapide : le taxi prend les quais, contourne l’Hôtel de ville, passe devant Saint Gervais, l’Hôtel de Beauvais, rue François Miron où résida le jeune Mozart et où naquit un certain F.Du…., la passagère se tasse sur son siège, rue Saint Antoine , voici l’église Saint Paul où se maria Léopoldine Hugo et le lycée Charlemagne ou étudièrent entre autres, Balzac, Francis Blanche et F.Du…, au fond de la rue de Béarn la place des Vosges, on tourne autour de la place de la Bastille, la rue de la Roquette, la porte dernier vestige de la prison avec les dalles où l’on calait la guillotine et enfin en haut de la rue le Boulevard Ménilmontant.


Le taxi s’arrête, le chauffeur se retourne ; plus personne sur le siège arrière. Il descend en colère pour le prix perdu de sa course, personne tout autour. Ce n’est qu’après avoir trouvé à la place de la passagère une pièce d’or où reste collée un peu de terre glaise que le chauffeur de taxi s’aperçoit qu’il vient de s’arrêter devant l’entrée principale du cimetière du Père - Lachaise


Nous sommes au Père-Lachaise. Deux solutions : on monte là où selon Thénardier on enterre les riches et du haut du cimetière on proclame comme Rastignac ; « A nous deux Paris !», ou l’on redescend pour ne pas rater le train à Austerlitz. Si vous voulez rentrer pour les dernières représentations, il suffit de descendre la rue de Charonne, gagner la Bastille, l’Arsenal et le quai d’Austerlitz où commença l’émeute suivant les obsèques du Général Lamarque. On traverse ce vieux Faubourg Saint Antoine qui a souvent senti la poudre , longtemps le bois la cire, le vernis et aujourd’hui les fumées et alcools plus ou moins latinos.

Plan de Paris de Vaugondy (Faubourg Saint-Antoine) - 1760


Faubourg Saint Antoine ; paroisse sainte Marguerite, paroisse de Nini Peau d’chien (voir les paroles de la chanson).


Marguerite Lambert ? Et savez vous où est l’église Sainte Marguerite ?


Rue Saint Bernard ! la boucle est bouclée, je vais me coucher…..
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* La Seine, jaune et large comme une mer, a couvert tous les travaux du port au blé. (Michelet, Journal, 1836, p.218).

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