lundi 30 juillet 2012

Traction et côteaux du Tricastin

Quatrième représentation, la meilleure selon Bruno (Aucante), qui nous avait quittés le temps d'une soirée, appelé sur un autre spectacle qu'il a mis en scène. Le temps était plus calme, je craignais un peu de relâchement après la tension de la veille, mais non, le rythme fut très soutenu, et j'ai pris beaucoup de plaisir à voir une nouvelle fois une pièce que je connais pourtant par cœur.

Plaisir aussi à retrouver des amis, au nombre desquels Joëlle et Jean-Claude, touchés par un deuil familial, mais qui ont tenus à venir ce soir-là. Délicate attention : ils avaient déposé dans l'après-midi deux bouteilles de Côteaux du Tricastin que nous eûmes la joie de déguster lors du repas acteurs.

Seule ombre au tableau de cette soirée : la disparition de nos beaux fusils, que nous avions, je pense, depuis Eté 1915. Sans doute ont-ils été barbotés dans la nuit ou au petit matin malgré la garde du site. Heureusement, il nous reste les vieux fusils en bois, qui ont moins d'allure, armes de polichinelle qui n'intéressent pas les malfrats, on s'en doute.

Plus réjouissant : tous les soirs, à l'ouverture de la seconde partie, une voiture ancienne remonte dans le château à fond de cale, transportant une poignée d'acteurs sensés être en retard. Hier, c'était la traction de Chacha. J'ai filmé. La lumière n'est pas fameuse, mais j'aime bien ce moment quand même.



Marie-Cécile, qui a assité à de nombreuses répétitions, a pris beaucoup de photos, qu'elle m'a données sur clé usb. Il y en a de très réussies. J'en extrais celle-ci, qui montre Jean-Mi (Champmathieu) en pleine révision, et dans le fond, les fameux fusils.


A part ça, sur France-Culture, début d'une série d'émissions sur Marylin :

Extrait de la présentation :
 “Bye Bye Baby… “ chante Marilyn Monroe. Que nous dit-elle ? Au revoir, adieu ?

Non, cinquante ans qu’elle est partie, et elle est toujours là, plus que jamais. Elle revient, elle nous parle. Comme si de son temps, le monde n’avait fait que la voir, la dénuder, la regarder, la désirer, peut-être. Mais pas l’entendre. Tout au long de cette « Grande traversée », elle prendra ce qui lui était le plus difficile : la parole, sa parole, telle qu’elle l’a livrée à des entretiens, telle que les témoins survivants l’ont écoutée, telle que nos contemporains tentent de la déchiffrer.  Marilyn Monroe nous parlera de Norma Jeane, et Norma Jeane dira : « Moi, Marilyn ».

Cette série d'émissions sur Marilyn Monroe s'ouvre chaque jour par un documentaire à base d’archives historiques et de documents nouveaux, réalisé à Paris, New York et Los Angeles."

dimanche 29 juillet 2012

Et de trois

Troisième représentation, au péril des averses. Il pleuvait encore à 21 heures passées, et la question de l'annulation se posait toujours. On consultait fébrilement les avis météo d'heure en heure sur une application de l'Iphone. Les plateaux étaient trempés, les sols glissants, les projecteurs en grand danger. Je donnai consigne de se préparer comme si de rien n'était et d'installer les accessoires au dernier moment.

Nous avons joué. Les lumières, qui tournaient à 90%, ont tenu, merci Marina et Yvan, qui furent sur la brèche pendant ces longues heures incertaines. Aucun incident à déplorer, ah si, une chute, dont je suis responsable, qui plus est. Au moment des saluts, du rappel, je conduisis un peu trop fougueusement notre ami Stéphane, dans son vieux fauteuil, jusque sur le plateau central. Un virage négocié trop vite, la roue antédiluvienne du rustique équipage se voila et le président du tribunal bascula. Mea culpa.

On fêta ensuite l'anniversaire de Jackie, notre charismatique metteur en scène de 62, Dédée Bernard, dont le petit trou sur les paroles de Hugo : "Les mots manquent...", fera sans doute date dans l'histoire de la pièce.

Pas de photos de la pièce en elle-même, pour cela je fais confiance à Yvan, qui a usé du Nikon toute la soirée, juste une vidéo de l'avant-spectacle, avec les petits travaux obscurs, mais indispensables, qui font aussi partie de l'aventure, et aussi le beau duo de violon de Gavroche et Navet.




samedi 28 juillet 2012

Seconde représentation : le Gavroche de 62

La journée était en vigilance orange, les cartes météo étaient constellées de gros nuages traversés d'éclairs, et à 17 h, on hésitait encore sur l'annulation ou non de la représentation, c'est dire si l'affaire était mal engagée. Et puis le ciel s'est découvert, le bleu a bousculé la grisaille, l'espoir est revenu et les spectateurs ont afflué, certes moins nombreux que la veille, mais surtout il y avait parmi eux Jacques Brisse, le Gavroche de 1962. Il avait douze ans à l'époque.

Jacques Brisse (Gavroche 1962) avec Louis Davier et Gaël d'Abadie (Gavroches 2012)
Jacques n'était pas venu les mains vides : il m'avait apporté une pièce d'archive émouvante, rien moins que son texte de Gavroche, dactylographié, encore impeccable cinquante ans plus tard. Ce n'est pas le texte intégral, mais il offre tout de même un large aperçu de cette adaptation, où la place du conteur et du chœur était très importante. En voici quelques vues.


Le conteur et le chœur ouvraient la seconde partie



Les répliques de Gavroche soulignées au crayon de papier.

Le rôle important du chœur de l'époque

Gavroche à la barricade

La fin de Valjean (j'ai repris sans le savoir les mêmes paroles sur Fantine et l'amour)
Extrait du spectacle : le tribunal (Scène 17), l'interrogatoire des bagnards :



Le reportage de Bip Tv, enregistré le jour de la générale (la séquence suit celle consacrée au spectacle de Chabenet).

vendredi 27 juillet 2012

Première

L'après-midi caniculaire nous a préparé la plus douce des soirées. Une première bien envoyée avec un public de plus de 300 personnes, réactif et chaleureux. Les anicroches n'ont pas manqué bien sûr, des répliques oubliées, des lumières qui tardent à s'allumer, des costumes intervertis, des accessoires pas mis en place, mais l'essentiel était présent, le courant porteur de la pièce, le flux d'énergie constant, les ruptures qui donnent son rythme à l'ensemble. Je sais maintenant que la pièce vit, et qu'il ne tient qu'à nous de la hisser plus haut encore. La météo ne s'annonce pas fameuse - déjà, hier soir, j'ai frémi aux premières gouttes qui sont tombées deux scènes avant la fin, à la sortie des égouts (ça, c'était bien vu de la part des puissances célestes), avec la crainte alors de ne pas pouvoir aller au bout -, mais j'espère que nous passerons le plus possible au travers, tel un Claquesous (Claude dans la pièce) se faisant la malle, après l'arrestation par Javert de la bande Patron-Minette :
Enfin, dans le trajet de la masure Gorbeau à la Force, un des principaux arrêtés, Claquesous, s’était perdu. On ne savait comment cela s’était fait, les agents et les sergents «n’y comprenaient rien», il s’était changé en vapeur, il avait glissé entre les poucettes, il avait coulé entre les fentes de la voiture, le fiacre était fêlé et avait fui; on ne savait que dire, sinon qu’en arrivant à la prison, plus de Claquesous. Il y avait là de la féerie ou de la police. Claquesous avait-il fondu dans les ténèbres comme un flocon de neige dans l’eau? Y avait-il eu connivence inavouée des agents? Cet homme appartenait-il à la double énigme du désordre et de l’ordre? Etait-il concentrique à l’infraction et à la répression? Ce sphinx avait-il les pattes de devant dans le crime et les pattes de derrière dans l’autorité? (Livre IV, 2)

Photos de l'avant-première, préparatifs, debriefings et habillages :

Hervé au debriefing avec Bruno

Debriefing avec Carole, Lou avec coiffure 1962.

Stéphane habille ses soldats

Moment de pause à la petite maison
Pauline à la choucroute 1962


jeudi 26 juillet 2012

Générale : Javert jouissait

En général, une générale, c'est un festival de ratés, d'erreurs et d'incidents.
La tradition a été respectée. Inutile d'épiloguer.
Aujourd'hui est le grand jour.

Ultimes retouches : Thénardier à la machine à coudre
 ***

Reçu ce matin cette subtile analyse de mon ami Jean-Claude Moreau, de Théâtralacs. Ne sachant trop comment "domestiquer la machine à commentaires", comme il dit, il m'a laissé libre usage du texte suivant. Je le reproduis donc ici, à destination des masses populaires :

"En prémices du « Misérables 62 », ce lundi 23 Juillet j’avais choisi de m’immerger dans « Les misérables », le roman, la fondation de nos imaginaires, la source de nos espoirs et, aussi, il faut bien l’avouer, l’indice de nos renoncements. . Je n’étais pas seul : une centaine de personnes s’étaient données LE MOT, lors de « Folie, les mots : » à Faux la Montagne, en Creuse, pour lire en entier et en continu le roman de Victor Hugo. Cela a commencé le samedi midi, s’est pratiqué par séances de lecture d’une demi heure, et cela s’est terminé dans la nuit de mercredi à jeudi à presque une heure du matin. Tout y a été dit et sans interruption.

Pour ma part, ayant été attrapé par « Cosette », j’en suis arrivé à la phrase suivante : « Javert jouissait ». Cette phrase portait assez de densité pour qu’un silence s’installât, c'est-à-dire que la transmission de témoin puisse s’opérer.

La politesse m’a conduit à écouter la suite. Je ne révèlerai rien de plus de ce qu’en dit Victor H. à propos de l’extase de Javert pour la simple et unique raison que c’est au lecteur de se faire le film. A la suite, par un curieux procédé de frustration littéraire, l’auteur se trouve pris dans un entrelacs de récapitulatifs et précisions historiques concernant le monastère de la rue Picpus, monastère dans lequel Fauchelevent signale sa qualité masculine (dont il n’use pas) à coups de grelots afin que les nonnes puissent l’éviter à toutes fins inutiles. Or, et c’est là que je veux en arriver, cette congrégation femelle appartient à l’ordre des Bernardines, ordre qui, suivant les dires de Victor H., doit plus à Saint Benoît qu’à Saint Bernard. En réalité c’est à un zélateur moderne de Saint Benoît, zélateur dont on m’excusera d’avoir oublié le nom, que l’on devrait la présence de ce couvent à voile cachant le menton. Bien sûr, il faut entendre « couvent » au sens de l’ensemble des femmes de la communauté et non pas du bâtiment lui-même. Et c’est dans ce rappel « Bernardien » qu’il me semble enfin comprendre toute la portée symbolique et spirituelle des « Misérables » de Victor Hugo adaptés par Patrick Bléron.

Ce dernier a justement rendu hommage au film que Raymond Bernard a pu réaliser à partir du roman de Victor Hugo. Tout n’est pas filmable, loin s’en faut, des actions et des inactions, du roman « Les misérables ». C’est l’avantage de l’écrivain sur le réalisateur : il sait que son auditoire pourra vaquer aux champs, cueillir la giroflée, prendre le métro ou faire une sieste réparatrice avant de retourner aux affres bernardines. Mais Raymond Bernard a été digne autant qu’il se peut, traçant par son nom la signature bernardine sans laquelle « Les misérables » ne seraient pas ce qu’ils sont. Curieusement, Bernard, Raymond de son prénom, n’est pas un nom d’emprunt. Bernard s’appelait bien Bernard. Et pourtant …

Pourtant, ce Raymond Bernard était fils de Tristan Bernard, humoriste reconnu, et homme à faire prendre des vessies pour des lanternes, pas si éloigné d’Alphonse Allais en art apparemment si peu bernardin. Élève studieux, voire brillant, Raymond laissa à son frère Jean Jacques l’art de la dramaturgie et ira pratiquer le bernardisme dans un état second, initié de manière absolument fortuite par son propre père : en effet, les circonstances firent que Raymond Bernard commença une carrière d’acteur pour un film tiré d’une pièce de Tristan Bernard et dans lequel jouait, facteur définitivement déterminant, l’immense Sarah Bernhard elle-même, excusez du peu.

Que « Les misérables », film de Raymond Bernard, soit en creux, une apothéose sibylline à la gloire de l’ordre des « bernardines » ne saurait étonner que les ignorants. Et ceci en dépit des apparences, puisque Raymond Bernard n’a pas proportionnellement attaché autant de temps à l’histoire de cet ordre dans le film que l’auteur originel, Victor Hugo, dans son roman. Il n’était pas si simple pour Patrick Bléron de signaler la cause bernardine avec autant de force que de tact. Mais il a créé le personnage d’Andrée Bernard à dessein. Bernardine d’occasion, Jackie Momot ne l’est pas assurément puisqu’il ne faut voir en ce « nom » qu’un rapport « second ». Pour l’incrédule, il lui suffira de s’imaginer justement les états « seconds » de la vie monacale et les indicibles dérivatifs qu’ils permettent. Victor Hugo (encore lui !) rappelle justement les affres de douleur et d’absence de douleur (suprême jouissance) que le port semestriel de la robe de bure octroyait aux valeureuses bernardines. Donc, rien ne permet de penser que Jackie Momot porte une robe de bure, puisque c’est son simple nom « Bernard » qui porte l’essentiel du message bernardin. Pour qui sourirait à l’égard de ce qui lui semblerait davantage « élucubrations » que faits avérés, je me contenterai de lui conseiller de vérifier dans l’ouvrage original. Sans les bernardines, pas de sauvetage de Cosette, pas de répit pour Jean Valjean, alias M Madeleine (et vice versa) etc. Vous voulez une preuve supplémentaire de l’emprise bernardine ? Je vous la livre en toute confidence : de même que dans une autre existence M Madeleine s’est appelé Jean Valjean, Patrick Bléron, dans une autre existence, s’est appelé Bernard Bernard. Et c’est là que tout a commencé. "

25/07/2012- Jean Claude Moreau.

mercredi 25 juillet 2012

Couturière et théâtre populaire

La couturière, c'est la répétition qui précède la générale. Les couturières y procédaient aux ultimes retouches sur les costumes, d'où son nom. Après une journée de chaleur un peu éprouvante, mais qui nous a permis de vivre une soirée agréable, sans la fraîcheur et l'humidité jusque là souveraines, nous nous sommes élancés après 22 heures pour deux heures et demie de spectacle. Beaucoup d'aspérités du filage de la veille ont été gommées et le rythme est plus soutenu. Se contenter de cela serait évidemment dommageable, il reste des progrès à accomplir, mais le sentiment général est que l'on tient enfin le bon bout.

Après la répétition, nous avons fait le point sur les lumières avec Nicolas, Marina et Yvan, et pas mal de perfectionnements et de petits changements vont être apportés pour la générale. Il reste encore des finitions de décor, et nous courons ce matin après un fac-similé de l'édition de la NR mentionnant en une la mort de Marylin.


Quelques photos prises à l'abri costume :

Gaby - 1962
Jean-Claude (homme du peuple)

Marina (Georgette, 1962)
Samuel et Vanessa (soldat et fille du peuple)
Sur la notion de théâtre populaire, je lis ce matin l'interview de Jean Vilar accordée en 1966 à Agnès Varda, et reproduite dans France-Culture Papiers. Il rappelle que le théâtre populaire a été créé en 1920, et une note de bas de page précise que c'est Firmin Gémier (1869 -1933), qui fête dans l'ancien Trocadéro le cinquantenaire (tiens, encore 50), de la IIIème République et la naissance du théâtre populaire qu'il conçoit comme "l'église sociale où le peuple doit prendre conscience de ses destinées."
Firmin Gémier, en 1927.

mardi 24 juillet 2012

Tribunes et premier filage complet

Un autre moment-clé dans l'histoire d'un spectacle d'été aux ruines : l'arrivée et le montage des tribunes. Cette année, ce fut plus simple que pour Dracula, où nous jouions dans l'autre sens, les gradins sur le plateau pentu. Là, c'est à peu près plat, et le travail de calage et de nivelage en est facilité. Il reste que c'est toujours un jeu de construction délicat, où il s'agit d'éviter à tout prix la précipitation. J'admire l'intelligence pratique de mes petits camarades techniciens, je ne suis en cette occasion guère qu'un manœuvre mal dégourdi.

Début des opérations
L'art fraudien du nœud en chaîne
Magali en pleine activité

Et voilà le boulot.
Et l'après-midi, les répétitions continuent (ici, Simon et Carole).
 
La liste des accessoires en souffrance rapetisse heureusement d'heure en heure. Mais il reste encore à mon goût trop de petits détails à régler : drapeau rouge, lampe à pétrole, rideau de l'alcôve, livres à couvrir de kraft...


Enseigne de l'auberge de Montfermeil (réalisation : Gary)

A plus de 22 h, nous avons donc commencé le premier filage. Les problèmes d'installation et de désinstallation de la veille ne se sont pas reproduits, et l'enchaînement des scènes s'est globalement bien déroulé, chacun semblant avoir pris ses repères. Évidemment, à l'intérieur de chaque scène, il demeure des scories et des fragilités, les deux générales à venir devraient permettre de renforcer l'ensemble et de resserrer le rythme. Car, au final, c'est environ deux heures et demie de spectacle qui se profilent, alors que je tablais sur deux heures - deux heures et quart. Nous nous rapprochons des trois heures de 1962. Ce n'est pas en soi un problème, si nous parvenons à soutenir le flux d'énergie nécessaire.

C'est en allant enfin me mettre au plume, à plus de trois heures du matin, que j'ai ressenti une brûlure dans la nuque. Le soleil des tribunes m'avait marqué au fer rouge des bagnards.

dimanche 22 juillet 2012

Filages

Hier et avant-hier, filages en soirée des deux parties du spectacle, et répétition de scènes de foule le samedi après-midi sous le soleil enfin de la partie. Réglage des installations et désinstallations de plateaux, essais de costumes, essais de fumigènes pour la scène de la barricade, recherche de précision et de rythme sur les entrées et sorties... Bref, nous sommes dans les journées décisives où il s'agit de parvenir à la première avec une pièce solidement en place, où chacun a pris ses repères et assume ses responsabilités.


Répétition des enfants, avec Bruno.

Répétition du chœur
Répétition dimanche après-midi, sous la chaleur enfin présente (vue de la tour)

Pour une raison assez mystérieuse, je ne parvenais pas à graver un nouveau cd de la bande-son. Fraud (the chief of scouts) y est parvenu, non sans difficulté, merci à lui. Et de mon côté, avec un cd-rw, à ma grande surprise, j'ai enfin réussi également. Eglantine, à la régie son comme pour Dracula, va pouvoir s'exercer sur un support pas loin d'être définitif.

Nouvelles cales (homologuées) pour les tribunes

Les costumes Maratier pour les soldats et gendarmes sont arrivés. Magnifiques, comme toujours (c'est chez eux que nous avions empruntés les tenues de poilus et de généraux d' Eté 1915). Il a tout de même fallu aller les chercher à La Courneuve. Quatre heures de bouchon pour Fanette, qui s'est elle-même chargée de la tâche. Beaucoup de fatigue au total. Je veux saluer ici son effort : habiller soixante comédiens, dont certains se sont déclarés tardivement, quand la plupart ont au moins deux costumes, pour les deux époques, 1962 et Misérables, eh bien, ce n'est pas simple, c'est dix à douze heures de travail par jour, et pas mal de stress.


 ***

Vendredi après-midi, nous avons eu la visite d'un vieil habitué des ruines. J'ai vu arriver un vieil homme par le portail, gravissant lentement la côte, appuyé sur ses deux cannes : c'était Camille, 94 ans, vivant toujours chez lui, route de Mouhers, lui qui, sur Martin Guerre, jouait encore le forgeron du village, et donnait, pour Robin des Bois, une utile leçon de lavoir. Rappelez-vous :


La leçon de lavoir par adpagavi

Camille et Hervé - Retrouvailles sous la pluie.


vendredi 20 juillet 2012

Nuit d'éclairage et cheval-jupon

Tout à coup un homme à cheval, vêtu de noir, parut au milieu du groupe avec un drapeau rouge, d’autres disent avec une pique surmontée d’un bonnet rouge. Lafayette détourna la tête. Excelmans quitta le cortège.
Ce drapeau rouge souleva un orage et y disparut. Du boulevard Bourdon au pont d’Austerlitz une de ces clameurs qui ressemblent à des houles remua la multitude. Deux cris prodigieux s’élevèrent : — Lamarque au panthéon !Lafayette à l’hôtel de ville ! — Des jeunes gens, aux acclamations de la foule, s’attelèrent et se mirent à traîner Lamarque dans le corbillard par le pont d’Austerlitz et Lafayette dans un fiacre par le quai Morland.
       Victor Hugo, Les Misérables, T.IV.

Avant-hier, nuit d'éclairage avec Bruno et Marina. Mise au point sur les lumières de la première partie. A trois heures du matin, un petit vent aigre nous frigorifie et je ne suis pas fâché de redescendre de la tour.
La matinée suivante, tandis que la bruine fouette la campagne cluisienne, nous fouinons dans une autre tour, celle de la mairie, où le Manteau entrepose ses costumes et accessoires. Les vieilles salles défraîchies, où somnolent plusieurs décennies de spectacles, recèlent parfois des surprises. Un vieux landau fera ainsi une superbe charriote pour la chiffonnière, et l'on repart avec une provision de surins pour notre pègre. 
Le portique construit la veille pour accrocher des projecteurs en contres est finalement jugé à l'unanimité, et même par ses promoteurs, comme inesthétique et envahissant. Il est démonté. Travail pour rien, dira-t-on, mais c'est ainsi parfois, on tente des choses que l'on ne gardera pas. Le spectacle vivant n'est pas une science, mais une exploration avec ses inévitables errements, impasses et fourvoiements. L'important est de savoir rectifier le tir à temps.
Je me réjouis de revoir le cheval-jupon, cet accessoire de théâtre que j'adore, et dont le maître incontesté est notre ami Hervé, alias Thénardier. Il a pris en stage le jeune Ludovic (qui doit le monter pendant la pièce). Avec lui, on a l'impression que la bête de grillage et de carton-pâte est animée d'une vie autonome.
Grand galop
Calmer la bête
L'auberge se remplit peu à peu, frigos, comptoirs, armoires, vitrine réfrigérée, chaises, tables, chauffe-eau. On résout les problèmes de plomberie, on met en fonction les toilettes sèches. On débarrasse l'abri costumes de tout ce qui l'encombrait et l'on place les portants, il faut étiqueter, classer, répertorier. Bref, ça turbine dans les ruines.

Marina et Bol au montage des blocs secours (courage, Marina, plus que cinq à faire)



Un article dans La Nouvelle République hier.

mercredi 18 juillet 2012

Premier filage et Gavroche

Premier filage partiel : de la scène 1 à la scène 19, un gros morceau donc de la première partie, avec deux scènes de foule, la charrette de Fauchelevent et le tribunal. Le test pour certains enchaînements. Bilan contrasté : l'ensemble se met en place avec une relative aisance, mais plusieurs transitions doivent être resserrées, les installations et désinstallations de mobilier sont parfois hasardeuses, quelques scènes restent très fragiles et certains comédiens sortent du jeu, alors qu'il y a nécessité de jouer avec l'incident s'il se présente, d'enchaîner quoi qu'il se passe.
On termine à 23 h 30, avec l'humidité de la nuit qui trempe nos textes, mais la splendeur des étoiles est comme une promesse d'une plus belle journée encore.

Nos techniciens et bénévoles ont été plus que jamais à l’œuvre : entre autres, le plancher du plateau central est terminé, une fontaine pour Cosette a été édifiée, ainsi qu'un banc pour la scène de Marius et Eponine.

La fontaine de Cosette



Répété aussi l'après-midi les scènes de Gavroche avec les deux groupes, les bruns et les blonds. Sur Gavroche, Hugo écrit ceci :
"Il avait une père et une mère. Mais son père ne songeait pas à lui et sa mère ne l'aimait point. C'était un de ces enfants dignes de pitié entre tous qui ont père et mère et qui sont orphelins.
Cet enfant ne se sentait jamais si bien que dans la rue. Le pavé lui était moins dur que le cœur de sa mère.
Ses parents l'avaient jeté dans la vie d'un coup de pied. Il avait tout bonnement pris sa volée."
 Pierre Péju, dans un très bel essai sur l'enfance, Enfance obscure (Gallimard, 2011), commente ce passage en ces termes.

" Voilà un enfant mal-aimé, oublié, jeté et rejeté. Un enfant battu. De qui s'agit-il ? Encore Gavroche, le fils maudit duu couple Thénardier, dont Victor Hugo,nous l'avons vu, fait l'emblème du peuple, de la ville de Paris, de la révolution, de la liberté. Ce "bout d'enfance" maltraitée qui rôde dans la nuit et les recoins infects, cette "petite grande âme" annoncerait, à elle seule, un avenir émancipateur, car dans Les Misérables comme dans nombre de poèmes hugoliens l'écrasement de l'enfance annonce un renversement imminent et radical. Maltraiter l'enfance est la pire bassesse dont sont capables les humains, l'ultime forfait d'un ordre social injuste avant sa métamorphose. De la même façon, la cruauté initiale de Valjean envers Petit Gervais qu'il effraye et humilie afin de lui voler sa pièce est l'occasion, pour l'ex-forçat brutal, d'un "devenir saint", et même d'une sorte de "devenir femme" puisqu'il réapparaît comme "Monsieur Madeleine", tout de bonté et de sensiblité à la condition prostitutionnelle de la femme pauvre."

mardi 17 juillet 2012

La ruche et le chat noir


Dans tous les coins du château, ça s'active, direction d'acteurs, lumières, sons, costumes, scénographie, logistique de l'auberge, la ruche théâtrale cluisienne vrombit des douves au donjon.

Andrée Bernard passe un savon à Marius et Cosette, sous le regard du chœur.


Gavroche et ses frères perdus, au repos dans la coulisse, maison du Seigneur.

Gavroche(Gaël) en costume.



Scène 39 (les vieilles pipelettes contre Gavroche)
Le plateau central en plein chantier
La scène du tribunal, avec Champmathieu (Jean-Michel) : le gendarme Dédé n'est pas encore vraiment dans son rôle.


Le tribunal sous les cieux menaçants.
Ampoule du svoboda.
Le svoboda, c'est cette galette de projecteurs que l'on va utiliser pour les égouts de Paris.
La providence nous a dépêché des scouts bordelais ; Fraud, grand Eclaireur de France, les a mis aux tranchées.

Enterrer les câbles, noble tâche.
Les tas de pierre devant les projos de la muraille, c'est eux aussi. Merci.

J'allais oublier le défrichage du donjon.
Marina peaufine son plan de feux.
Eglantine prend ses marques, sous les conseils de Fraud, le cornaqueur de scouts.
Et pendant ce temps-là, certains font la pause clop.

Le chat d'Eponine (Carole) en liberté dans le château, s'invite à la répétition.

Il n'a pas l'air d'apprécier la mort d'Eponine, Bruno est obligé d'intervenir.